Interview auteur n°6: Avril Cara

1- Bonjour ! Pourrais-tu te présenter en quelques lignes ?

Bonjour Salema. Je constate que l’on commence directement avec LA question fatidique que tout le monde redoute ! Il est toujours délicat de parler de soi-même sans passer pour : a)Une personne sans conversation qui y répondra tel un modeste « ASV ? » datant de la période post-2000. b)Quelqu’un optant pour la description complète de son curriculum vitae avec échantillon d’urine à l’appui. c)Une réponse des plus conventionnelles qui permet de présenter notre personne le plus simplement possible, quitte à manquer d’originalité. Personnellement, je me contenterai d’un modeste « Avril Cara, trentenaire, et j’aime écrire des trucs*. Et accessoirement, j’adore regarder les étoiles et les champignons. ».

*Définition de « Truc » : dans le langage avrilien, se dit de toute histoire avec des personnages féminins un brin rêveurs, des arbres aux courbes pulpeuses, ou encore des astres qui s’illuminent au gré de leurs humeurs.

2- As-tu choisi de publier tes écrits sous ton vrai nom ou sous un pseudonyme? Peux-tu nous dire pourquoi?

C’est amusant que tu poses cette question, parce que le tout premier récit que j’ai osé publier en auto-édition était sous un nom d’auteur choisi à la va-vite. Avec le temps, j’ai pris conscience que ce choix n’était pas des plus judicieux pour une raison très simple : absolument personne ne savait le prononcer correctement (ou presque !). Des années plus tard, j’ai signé un contrat avec une maison d’édition pour un autre récit. J’ai pris de l’âge, de la maturité et ma plume aussi. Désormais, je ne suis plus seule derrière mes écrits, il y a également une équipe qui m’aide à rendre mon histoire la meilleure possible. Comme je suis passée de l’autopublication au contrat d’édition, il s’agissait à mes yeux du moment le plus opportun pour faire « peau neuve ». J’ai évolué et mon nom de plume aussi. Et le bonus final : j’ai enfin choisi un pseudonyme qui se prononce et se mémorise facilement !

3- Quand as-tu commencé à écrire ? Tu as testé l’auto-édition et les maisons d’édition. Comment choisis-tu ta méthode de publication lorsque tu écris une nouvelle oeuvre?

D’aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours écrit. Je crois que tout a commencé le jour où j’ai aperçu quelqu’un rédiger sur un journal intime. Cette personne m’a donné envie de faire la même chose alors que j’avais déjà bien des difficultés à écrire mon nom correctement. Rapidement, je suis passée des « Aujourd’hui, Camille m’a embêtée pendant la récré » à des phrases un poil plus évoluées avec des histoires de fantôme et autres créatures fantastiques sorties tout droit de mon imagination. Le comble dans tout ça ? Ma famille n’a jamais cru que ces histoires étaient de moi ! Pour eux, je réécrivais avec mes mots d’enfant un dessin animé vu à la télé ou un conte lu dans un livre. Concernant mes méthodes d’éditions et comme dit plus haut, j’ai opté une première fois pour l’autopublication. Tout comme mon premier nom d’auteur, je l’ai fait sur un coup de tête. Plutôt habituée des manuscrits qui traînent dans les tiroirs ou dans un dossier oublié de mon ordinateur, je me suis dit simplement « Si tu ne le balances pas tout de suite sur Amazon, tu vas l’abandonner, l’oublier, et peut-être même le supprimer par mégarde… Et puis de toute façon, qui te lira ? Absolument personne, voyons ! ». Sauf qu’on m’a lue. Et que j’ai eu des retours… Je n’avais absolument pas prévu ça, et encore moins que certaines personnes apprécient mon histoire. Après, mon premier roman n’est pas exempt de défaut, loin de là… La publication « sur un coup de tête sans y croire » n’a pas eu que du bon. Des années plus tard, j’ai repéré un appel à texte d’une maison d’édition que j’apprécie. En secret, je fantasmais sans y croire à l’idée qu’elle puisse m’éditer un jour. Sur un coup de tête (encore une fois…), j’ai rédigé une histoire dans un genre auquel je n’avais encore jamais touché. Parce que même après toutes ces années, je ne croyais pas plus en moi qu’au premier jour. Et trois mois plus tard, j’ai eu l’immense surprise de recevoir un contrat pour ma participation. Moi. Celle qui conserve de trop nombreux récits abandonnés dans un tiroir ou dans un dossier. Même aujourd’hui, il m’arrive encore d’en douter !

4- Comment décrirais-tu ton univers ? As-tu des sources d’inspiration privilégiées ?

Difficile de résumer mon univers en quelques lignes sans perdre du monde en route… Avant tout, j’aime me laisser bercer par mes propres émotions. Nous avons tous vécu bien des choses au cours de nos vies. Des événements joyeux, d’autres tristes. Parfois, certains nous donnent le sentiment d’être les rois et les reines de l’univers alors que quelques instants plus tard, on se retrouve au fond du gouffre, creusant autant que possible afin de disparaître de la surface du monde. Ces émotions brutes sont celles qui m’animent. Et c’est celles-ci que je souhaite transmettre. Combien de fois m’a-t-on reproché d’avoir l’esprit ailleurs ou d’être trop rêveuse ? Je dis souvent que j’ai la tête dans les étoiles et ce n’est pas si loin de la réalité. Allongé dans l’herbe sous le ciel obscur à contempler les merveilles du monde, c’est bel et bien ce que je préfère. Je puise mes inspirations dans les silences et la solitude, également. Un simple orage à travers la fenêtre est pour moi la meilleure des compagnies littéraires. La pluie chantonne et le vent me susurre mille et un secrets dont je suis l’unique détentrice. Libre à moi de vous les partager… Ce que je fais, mais seulement parfois.

5- Ta nouvelle en cours de publication est du SF lesbien. Peux-tu nous présenter cette histoire ?

Bien entendu ! Alors, nous sommes au XXIIIe siècle et un vaisseau quitte la Terre pour rejoindre une base spatiale lointaine. Le couple de l’histoire, l’une amoureuse comme au premier jour et la seconde, bien plus carriériste que romantique, appartient à l’équipe et participe à cette migration. Mais cela va sans dire que les choses ne se dérouleront pas comme prévu… Le seul détail supplémentaire que je puisse mentionner, c’est qu’en plus d’être de la science-fiction, ma nouvelle est du genre Planet Opera. Avec cette histoire, j’ai souhaité m’éloigner du cliché habituel allant de la rencontre à l’amour naissant. Parfois, la routine s’installe et il devient difficile de s’aimer comme au premier jour. Ici, nos deux protagonistes sont en couple depuis plusieurs années. De plus, chaque chapitre a un narrateur interne différent. Parfois l’une, parfois l’autre. Et on prend conscience d’une vérité universelle : même avec toute l’affection que peuvent ressentir deux personnes l’une pour l’autre, il arrive dans certains cas qu’un fossé invisible se creuse entre elles.

6- Ton 1er roman auto-publié s’intitulait « Quand Léa rime avec Alexia ». De quoi s’agit-il?

Alors là, on s’attaque à une romance saphique contemporaine ! Exit le monde de l’imaginaire et place à l’émotion brute qu’est « la peur » ! Et quand je parle de peur, j’aborde celle qui paralyse, qui nous empêche de faire ce que l’on veut de notre vie. Comme quitter une personne qui nous maltraite, par exemple. « Quand Léa rime avec Alexia », c’est l’histoire d’une jeune femme en couple avec un homme. Il la terrifie et la malmène au point qu’elle n’a plus aucune vie sociale. Et même sortir de son appartement est une lutte qu’elle ne réussit à endurer que pour aller chez son psychiatre une fois par semaine. Mais le hasard lui apportera une certaine Alexia sur son chemin et pour ne pas changer… Il va se passer « des trucs » Avec cet ouvrage, j’ai souhaité parler de deux sujets qui me tiennent à cœur. Le premier, c’est celui de la phobie sociale et agoraphobie. Avec ces deux symptômes, il suit très souvent celui de la dépression et du manque de confiance en soi. Des handicaps invisibles qui provoquent dans la majorité des cas l’incompréhension auprès de l’entourage ou des gens en général. Dans notre société actuelle, être atteint de ces maladies est une preuve de lâcheté là où il suffit de se « remuer les fesses » pour s’en sortir. Et les envies morbides qui vont parfois avec, elles sont tabou. Dans « Quand Léa rime avec Alexia », j’ai souhaité parler de toutes ces émotions sans filtre. Le second sujet que j’aborde, c’est celui de la maltraitance conjugale. Très souvent encore, on accuse les victimes (qui ne sont pas exclusivement des femmes, ne l’oublions pas !) de rester auprès d’un partenaire toxique. Il se dit parfois que ses victimes n’ont pas assez souffert. Qu’elles se complaisent dans ces relations. Mais à maintes reprises, les personnes qui sont dans le jugement n’ont jamais rien vécu de ce genre. La maltraitance, qu’elle soit physique, psychique ou émotionnelle est un mal terrible. Et il faut en parler. Que ça soit à travers des reportages, des biographies ou des romans. C’est un phénomène qui tue, parfois sous le coup de la colère, parfois à petit feu. À ma façon, j’ai voulu porter ma pierre à l’édifice. Et même si je n’arrive à sensibiliser qu’une seule personne sur le sujet, j’aurai accompli mon souhait.

7- As-tu des méthodes préférées d’écriture ou laisses-tu tes personnages fabriquer l’histoire? Quels outils aimes-tu utiliser?

Très honnêtement, je mentirai si j’affirmai avoir une méthode infaillible d’écriture… J’ai essayé d’entamer des histoires sans le moindre plan ni fiche de personnage pour finalement me retrouver avec des post-it un peu partout autour de mon bureau. J’ai ensuite testé la méthode « flocon de neige » pour dévier drastiquement en cours de route, à croire que mon GPS avait effectué une mise à jour un brin foireuse… Malgré toute ma bonne volonté, je pense être une très mauvaise élève lorsqu’il s’agit de suivre des indications scénaristiques précises. Tôt ou tard, mes personnages finissent toujours par prendre vie et par me faire un bras d’honneur avant de prendre les rênes de mon récit… Le seul qui reste relativement docile à mes côtés, c’est Word… Lui au moins, il fait ce que je lui demande. Mais ne va pas lui répéter, il serait fichu de me laisser en plan à son tour…

8- La diversité littéraire est-elle importante pour toi ? Aimes-tu y participer à travers tes écrits ? Si oui, de quelles façons?

Comme je pense l’avoir laissé transparaître avec ma romance saphique, j’aime traiter de sujets qu’on n’aborde pas forcément avec mamie au coin du feu… Le handicap invisible en était un, mais il y a aussi les rapports entre femmes. À notre époque actuelle, l’homosexualité n’est plus un délit (du moins, plus en France…) mais de là à dire qu’elle est commune, nous en sommes malheureusement loin. Nous serons tous d’accord pour dire que l’homophobie est encore présente sur les réseaux sociaux comme dans la rue. À mes yeux, l’un des moyens pour banaliser notre orientation sentimentale ou sexuelle, c’est d’en parler le plus simplement possible. Le terme « lesbienne » ne devrait pas être censuré sur internet. Ce n’est ni un gros mot ni une incitation à visionner des images ou vidéos pour les plus de 18 ans. Si je peux participer modestement à la représentation LGBTQ+ dans la culture en présentant des personnages réalistes et ordinaires, alors je serai fière d’y contribuer.

9- As-tu d’autres projets en cours ? Pourrais-tu nous en dire quelques mots?

Je t’avoue que cette question tombe bien, car j’ai terminé récemment le premier jet d’un nouveau roman ! Il me reste bien des corrections à apporter… Mais pour toi, je veux bien t’en parler un peu ! Dans ce récit, on se trouve à Paris à la fin du XIXe siècle. À cause des difficultés de la vie, mon héroïne se retrouve embauchée dans une luxueuse maison close. Par conséquent, elle découvre un nouveau monde féminin, fait d’amitié et d’inimitié, de conflit et de jalousie. Je peux difficilement en dire plus pour le moment, mais je compte proposer ce roman à ma maison d’édition qui ne publie que des histoires « FF », ce qui en dit long sur son genre. Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, il ne s’agira en aucun cas d’une histoire érotique, malgré l’univers de la prostitution dans lequel on baigne. Ici, j’ai souhaité aborder ce sujet tel qu’il était à l’époque de nos arrières grands-parents. J’ai puisé mes ressources dans de nombreux ouvrages afin de me rapprocher le plus possible de la vie des prostituées de la Belle Époque. Et finalement, il n’y avait pas que le sexe et les clients dans leur quotidien, mais tout un tas de choses que vous pourrez découvrir à votre tour !

10- Où peut-on te lire ? C’est l’instant pub! N’hésite pas!

Et bien pour le moment… Nulle part ! On pourrait croire à une blague, mais non J’ai retiré mon premier roman « Quand Léa rime avec Alexia » de la vente il y a plusieurs mois afin de le retravailler intégralement. Des scènes vont disparaître, d’autres ajoutées. Les personnages seront remaniés également et comme je l’ai mentionné plus tôt, ma plume a changé. Ce que j’espère, c’est séduire de nouveaux lecteurs avec cette histoire, mais que les anciens puissent tout autant la redécouvrir et avec plaisir ! Quant à ma nouvelle SF, il faut plutôt poser la question à ma maison d’édition Reines de Cœur, car c’est elle qui a mon manuscrit entre les mains !

11- As-tu quelque chose à ajouter ?

Difficile d’ajouter quelque chose quand on a l’impression d’avoir parlé pendant des heures entières ! Cependant, vous pouvez encore me retrouver sur Twitter et sur ma page Facebook. Mais je serai un peu moins bavarde, promis !

Merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions. N’hésitez pas à retrouver Avril Cara sur les réseaux sociaux!

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